Les CHASSE-NEIGE DE LA PORTE DES LILAS
Précision avant lecture: J’ai écrit il y a quelques années pour un magazine hebdomadaire, un sujet sur la neige à Paris. les chiffres ne sont peut-être plus à la page mais le reste, si.
La neige, à la montagne, on raffole. La neige à Paris, ça affole.
Et pourtant tout est prévu, pensé, dosé, pesé, essayé, stocké. 6000 tonnes de sel, La Baleine à 600 F (91,47 EUR) la tonne, sont répartis Porte des Lilas, Porte Pouchet (17e), Porte d’Ivry(13e). 36 lames de déneigement et 34 camions de salage, sont parqués dans les garages de la Porte des Lilas et de la Porte de Clichy.
Au quartier général de la viabilité hivernale, dans le 20e, les 230 membres de l’équipe attendent avec une certaine impatience l’apparition des premiers flocons. Depuis Septembre, ils passent en revue le matériel, peaufinent les itinéraires de salage suivant un programme rodé depuis longtemps, perturbé cette année par la mise en place de Vigipirate. L’unité qui intervient également en cas de manifestations exceptionnelles ou d’accidents, a procédé à l’enlèvement des corbeilles.
La sortie des véhicules est gérée par un système informatique sophistiqué en relation avec Météo France et les 5 stations météo de la ville de Paris créées pour les 7 zones climatiques différenciées. Deux zones sont classées « froides » (Butte Nord –Est : Montmartre-Lilas, Butte Sud : Panthéon-Butte aux Cailles) et cinq sont classées « chaudes » (Est, Ouest, Sud de la Seine, Centre, Boulevard périphérique).
L’ordinateur apprécie un certain nombre de paramètres : de la température de l’air à celle du sol, couplées à des images radars sur l’importance et la vitesse de déplacement des précipitations.
En fonction de ces informations, 14 seuils de déclenchement de sortie des véhicules de salage sont prévus. Le premier est la conjonction d’un sol humide et d’une température de 1° qui va en diminuant. En général on commence par « la montagne, enfin les buttes ».
Dans les véhicules, prend place un pilote qui indique au chauffeur l’itinéraire suivant le » road-book « . Le plan est établi en fonction du taux de fréquentation, de la largeur des rues, des travaux en cours, des sens de circulation…
Toutes les voies de bus sont systématiquement traitées.
Comment ça marche?
Les camions sont équipés de 2 réservoirs. L’un contient de la saumure (eau salée à saturation) qui va abaisser le point de congélation en-dessous de zéro et l’autre distribue du sel sec qui va maintenir une certaine concentration de sel afin d’éviter la formation de gel quand la neige se dilue. La vitesse de fonte est de 2 à 3 cm par heure. Rien d’instantané.
S’il tombe plus de 3 cm par heure, les lames de déneigement interviennent avec leurs inconvénients. La neige est repoussée (le cordon) sur le côté, coince les voitures ou encombre les trottoirs. (48 h pour 850 km et 8 jours pour enlever les cordons). Dans les bois de Boulogne, de Vincennes et sur les trottoirs plantés, on applique du sable pour ne pas abîmer la végétation mais il ne fait qu’empêcher de glisser et ne fait pas fondre la neige contrairement au sel qui agit jusqu’à moins 11°.
Petit problème arithmétique:
Il faut recommencer l’opération-sel toutes les 600 voitures. Si l’on compte 1800 voitures par heure, il faut repasser toutes les 20 mn. Avec le parc de camions actuel, il faut compter 5 heures pour traiter en salage les 850 km sur les 1400 km de voies existantes.
Les 55 ouvriers et les 30 chauffeurs sont en alerte 24 h/24 y compris les week-end où ils se trouvent sous astreinte à domicile.
Dormez en paix, bonnes gens, les chasseurs de flocons de la Porte des Lilas veillent sur les cols parisiens.