Le CNCS, Centre National du Costume de Scène, qui occupe une ancienne caserne du 18e siècle, fête cette année ses 10 ans. Les festivités débutent par l’exposition Barockissimo! jusqu’au 18 septembre.
Les costumes que vous allez découvrir sont ceux des productions Les Arts Florissants, ensemble musical qui a remis au goût du jour la musique baroque, s’exposent. Une belle et riche expo, pétillante de couleurs et d’imagination. Et cerise sur le chapeau : d’intéressantes explications. Poussez donc jusqu’à Moulins dans l’Allier! C’est seulement à 2h30 de Paris.
La visite commence au rez-de-chaussée par la salle d’honneur, la mode du Grand Siècle et Molière… avec Le Malade Imaginaire et Le Bourgeois Gentilhomme : « nous avons voulu que les visiteurs soient accueillis par des gens qu’ils connaissaient » précise Martine Kahane, l’une des commissaires de l’exposition avec Catherine Massip. Toutes les deux ne sont jamais en peine d’une anecdote! La dernière salle, la plus grande explose de couleurs avec la démesure de l’œuvre « Les Indes Galantes » de Rameau. et mises en valeur .
Scénographie sobre mais expressive d’Alain Batifoulier et Simon de Tovar
Chaque vitrine propose deux œuvres associées et les explications qui vont avec: Chaque salle propose un panneau sur l’œuvre, le compositeur, les textes sont clairs et bien écrits et même lisibles ! Rien n’a été oublié. Vous avez même les noms des interprètes qui ont porté les costumes, la date de la représentation et un repère historique. Des encarts spéciaux sont placés à la hauteur des yeux d’enfants. Des encarts proposent des esquisses, des bouts de tissus, de matières… Des écrans passent des vidéo en rapport avec l’œuvre. « Ainsi les visiteurs voient les costumes en mouvement », ajoute la commissaire. Les salles se succèdent : Haendel, Charpentier, Rameau, Lully, Purcell, les époques et les costumiers aussi.
Les scénographes ont voulu créer une intimité avec les costumes dans des vitrines blanches pour les costumes moins fragiles. « Au sol, la luminosité a été prolongée par du blanc et un dessin de rideau de scène à l’envers pour éviter que la vitrine soit une barrière. » Sur les murs des cadres baroques et des jeux de miroirs. Au plafond, des câbles rouges courent tout le long de l’exposition, tels une portée musicale.
Le costume, reflet des époques
Le costume raconte l’histoire, l’évolution sociale mais aussi celle des corps. Tendance orientaliste pour Sersé de Rameau, turban de soie sauvage jaune or, signe de pouvoir et de bonheur dans la thématique orientale. Pour David et Jonathas de Charpentier, les personnages bibliques sont habillés années 50.
Le costumier suit la vision du metteur en scène qui imprègne l’œuvre. On suit l’évolution des mœurs, des idées politiques, de la société. « Au XXe siècle, les dictateurs sont souvent habillés en uniformes militaires ». Dans Platée, Jupiter est représenté en clone de Karl Lagerfeld, perruque, costume noir et chemise à col dur alors que les deux aquilons sont vêtus de costumes de ville imprimés de charmants petits nuages.
Dans Saint Alexis, William Christie a choisi de faire interpréter des femmes par des hommes comme à l’époque. Problème pour le costumier : comment habiller un homme en femme ? Alain Blanchot a conçu la tenue comme une boîte avec un volume très large et a placé, surplis, cape… sur les épaules pour cacher la naissance des seins.
Pas d’expo permanente mais des réserves
Les robes, vestes, chapeaux et autres fracs, sont trop fragiles pour les laisser en permanence à la lumière et à la merci des changements de température. Les expositions sont donc toutes des expositions temporaires de cinq mois environ à l’exception de la riche collection Noureev dont les éléments tournent régulièrement (costumes, photos, et même le salon reconstitué de son appartement parisien).
Dans la partie moderne du musée, 10 000 costumes désinsectisés sont conservés sous papier de soie au ph neutre, à la température constante de 20°dans les réserves de 1700 m². Un projet d’extension est à l’étude pour 2018-2019.
Du 18e au XXIe siècle
Les costumes les plus anciens possédés par le CNCS remontent au milieu du 19e siècle. En effet, les compagnies usaient et réutilisaient les tenues de scène et souvent ces costumes étaient la propriété des comédiens. Beaucoup n’ont pas traversé les siècles. Mais quelques gilets masculins provenant du fonds de la Comédie Française, sont datés du 18e siècle et précieusement conservés à plat, dans des boîtes. Ne croyez pas que les plus récents sont les moins fragiles, au contraire. Et oui, les matériaux employés pour ces pièces uniques, ont beaucoup changé et sont éphémères tout comme les tenues faites pour l’illusion. Aujourd’hui, on colle au lieu de coudre, on met des aimants pour fermer les corsets au lieu de lacets…
C’est une exposition réussie que l’on peut voir en famille. Pensez-y si vous passez par la région auvergnate. Et si vous préférez la chansonnette, nouvelle exposition « Les costumes de la chanson française » aura lieu de mi-octobre au 5 mars 2017. Et pour le 14 juillet, grand bal costumé si vous aussi, vous avez envie de vous travestir. D’autres animations sont prévues pour fêter dignement cet anniversaire de ce lieu unique au monde.