Au théâtre La Bruyère, deux pièces de couple, très différentes sont à l’affiche.
A 19h, La Vie rêvée d’Helen Cox d’Antoine Rault, est une comédie romantique pleine de charme. A 21h, un couple historique se déchire dans Signé Dumas de Cyril Gély et Eric Rouquette. Deux beaux duos de personnages.
Helen Cox est une romantique, fleur bleue qui a trop lu de contes de fée ou trop regardé les comédies romantiques américaines. Elle rencontre un dentiste lors d’un vernissage, un ex-copain de jeunesse. Cet homme qui a flashé sur elle, lui plait même s’il ne la fait pas vibrer comme elle imaginerait sa rencontre idéale avec un acteur célèbre. Il lui dirait les mots qu’elle attend, la comblerait de cadeaux et d’attentions comme dans un rêve éveillé. Seulement voilà, la vie n’est pas un songe. Bientôt l’écart entre réalité et illusion rattrape Helen. La vie se chargera d’ouvrir les yeux d’Helen sur ce qu’elle a à portée de main.
Christelle Reboul est l’insatisfaite: tour à tour mutine, de mauvaise foi, déçue et pleine d’espoir. Jean-Pierre Michaël incarne avec brio et vérité, les deux hommes d’Helen: l’homme amoureux et perdu qui n’a aucune idée des attentes de sa femme et l’acteur imbu de lui-même. La mise en scène de Christophe Lidon est inventive. Une pièce à la fois légère et tendre, drôle et pleine de charme qui plaira aux femmes et en apprendra un peu plus sur elles à ces messieurs.
Créée en 2004, Signé Dumas, revient dans une nouvelle production. Un nouveau duo pour incarner l’ogre Alexandre Dumas et le rigide Auguste Maquet, son « collaborateur » ou le véritable auteur des Trois Mousquetaires? C’est tout l’enjeu de la joute qui va opposer les deux hommes alors que le Paris de 1848 s’embrase.
Dans une dépendance du château de Monte Cristo à Port Marly, Alexandre Dumas vient houspiller Auguste Maquet pour qu’il accélère l’écriture du Vicomte de Bragelonne et lui donner mille directives sur les ouvrages à venir. Alexandre brûle la chandelle par les deux bouts et a besoin d’argent pour ses dépenses somptuaires. Un soldat survient. Il annonce des émeutes à Paris, Louis-Philippe a abdiqué. Alexandre s’emballe, il se voit bien ministre dans le prochain gouvernement sous l’égide de la régente. Auguste lui, pense plutôt que la seconde république est imminente. Pour une fois, Auguste, le collaborateur s’oppose à Alexandre. Il n’est pas ni un employé ni un faire-valoir, il est l’écrivain et sans lui Alexandre n’existe plus. Une affirmation qui suffoque l’auteur des Trois Mousquetaires. Mais qui donc écrit réellement les romans signés Dumas?
Dans la première partie, Dumas mène le jeu et écrase de sa puissance physique et verbale, ce petit homme introverti, frêle et sec. Mais bientôt le rapport de force s’inverse. Maquet est indispensable, il sait des choses, que serait Dumas sans les idées et la puissance d’écriture de cet homme de l’ombre? Maquet existe et a des exigences. Mais que serait Maquet sans Dumas… Ne sont-ils pas liés pour le meilleur et pour le pire?
Xavier Lemaire, très convaincant, incarne un Dumas autant physiquement que dans son abattage et son appétit de vivre. Davy Sardou se glisse dans le costume sombre de Maquet avec nuances et subtilité. N’oublions pas le soldat, Thomas Sagols, qui intervient pour faire avancer l’action. Il arrive à se glisser entre les deux personnages sans être en décalage.
Une jolie mise en scène de Tristan Petitgirard pour une pièce qui nous emmène dans les méandres de la création artistique autant que dans les coulisses de l’histoire littéraire.