Archives de Tag: comédie française

En passant

Dans la série On s’en Passe, vous pouvez éviter Les Damnés à la Comédie française. Vous pouvez voir éventuellement Moi et François B au théâtre Montparnasse si vous aimez François Berléand (et on l’aime beaucoup). Mais sachez que c’est du théâtre … Lire la suite

Autant en emporte la Mer

La Comédie Française offre un spectacle de grande qualité avec l’entrée au répertoire sur scène, de La Mer de l’auteur britannique Edward Bond. Riche en interrogations existentielles , toute en finesse, cette pièce est sublimée par la mise en scène forte  d’Alain Françon qui a monté de nombreuses oeuvres de cet auteur. C’est une pièce romanesque, à part dans l’univers plutôt violent et abrupt de l’auteur autodidacte né en 1934. Un bon point de départ pour découvrir l’oeuvre d’Edward Bond, dit le dossier de presse.  N’hésitez pas.

LA MER -Nous sommes au début du siècle dernier, avant la première guerre mondiale, à l’aube d’une nouvelle société. Tout commence par une tempête, une vraie, au coeur de la nuit, sur la scène de la Comédie Française. La mer a pris dans ses filets le bateau de Willy et son ami Colin, pressé de voir sa fiancée. Hatch, le garde-côte amateur et ses amis pourraient sauver Willy mais il prend les deux amis pour des martiens….Colin se noie. Willy côtoie les habitants en attendant que la mer rejette le corps du noyé et la fin de l’enquête.

LA MER -La mer est un personnage central dans la pièce. Elle est l’alpha et l’omega des habitants du village qui stagnent à proximité, menés et dominés par l’austère et dictatoriale Mme Rafi (Cécile Brune).  Pour les gens qui gravitent autour d’elle y compris le pasteur, peu de perspectives et beaucoup de frustrations. Willy vient d’ailleurs, il est le regard extérieur sur toute cette communauté d’un autre temps.  Il est aussi l’espoir qu’une autre vie existe ailleurs si on veut bien ne pas avoir peur de la choisir. La pièce parle de liberté, de courage, de solidarité et d’amour.

LA MER -Ne croyez pas que cette pièce donne dans l’intellectualisme pur, au contraire, pas de démonstration mais l’auteur n’enfonce pas son message à coup de marteau. Il nous plonge dans la vie du village et petit à petit se dessine ce qui se joue derrière les attitudes de chacun. Bien qu’on s’amuse à assister à la répétition de la pièce Eurydice avec le pasteur et les dames du village dirigée par Mme Rafi ou aux élucubrations de Hatch qui finira par perdre la tête et de ses sbires, chaque scène est l’occasion de découvrir les jeux de pouvoir et les relations entre les habitants. La tragédie et la comédie se mêlent au drame. Willy va ainsi rencontrer Rose, la fiancée de Colin qui avant d’être mariée se voir déjà veuve et Evens qui vit sur la plage (Laurent Stocker).

LA MER -

photo Christophe Raynaud de Lage comédien Hervé Pierre est Hatch


La scénographie est somptueuse, à la fois réaliste avec la plage où l’on sent presque l’eau venir nous lécher les pieds au magasin 1900 suggéré en passant par le salon de Mme Raffi.  Comédiens, mise en scène, costumes, décor, tout est à l’unisson pour sublimer la pièce écrite par Edward Bond à notre époque. Une vraie réussite et un sentiment, qui reste en nous bien après avoir quitté la Comédie Française, l’envie d’échapper à l’étouffement d’une vie sans perspective et de trouver le courage de tenter l’aventure ailleurs.
jusqu’au 15 juin en alternance.
Photos Christophe Raynaud de Lage Coll Comédie Française

la distribution: Cécile Brune Louise Rafi Éric Génovèse le Pasteur Coraly Zahonero Mafanwy Price Céline Samie Rachel Laurent Stocker Evens Elsa Lepoivre Jessica Tilehouse Serge Bagdassarian Carter Hervé Pierre Hatch Pierre Louis-Calixte Thompson Stéphane Varupenne Hollarcut Adeline d’Hermy Rose Jones Jérémy Lopez Willy Carson Jennifer Decker Jilly et les élèves-comédiens Pénélope Avril une femme Vanessa Bile-Audouard Davis et une femme, Hugues Duchêne Homme du village Laurent Robert Homme du village

 

En passant

Les théâtres parisiens n’ont pas encore baissé le rideau pour cet été. N’ayez pas peur si vous restez dans la capitale en juillet et août, des pièces juste pour la saison seront à l’affiche. En attendant des pièces nouvelles de … Lire la suite

Ah, si j’étais russe… Tchékhov et Gorki à l’affiche

Odéon un dimanche après-midi. Je vais voir Ivanov, mise en scène Luc Bondy, décor de Richard Peduzzi, the décorateur de Patrice Chéreau. Comme à son habitude, Luc Bondy qui ne se mouche pas du pied, a choisi la version première de la pièce que Thékhov a remanié plusieurs fois. Par souci de purisme je suppose… Pièce de jeunesse qu’on ne monte pas souvent…j’aurais du me méfier. Le héros, le merveilleux Micha Lescot (qui gagnerait à être connu au-delà du 5e, 6e, voire du 8e arrondissement quand il s’aventure au Rond-Point) est sur scène sur un tabouret devant le rideau alors que les spectateurs entrent. Tout au long de la pièce il lance, « je m’ennuie, je m’ennuie ». Il n’est pas le seul… j’entends les commentaires « mais les russes c’est comme ça, c’est lent ». merci je connais mais lenteur ne veut pas dire chiant ni longueur non plus. La preuve j’ai énormément aimé « Les Estivants » de Gorki à la Comédie Française écrit en 1904, un an avant la révolution de 1905.

ivanov_depagne-8Pour revenir à Ivanov, le héros est fatigué: de sa femme malade, la superbe Marina Hands, de ses amis, de son domaine, bref de la vie. Un instant il cède à l’envie d’une jeune fille amoureuse, mais peine perdue, il l’ennuie aussi et finit par se faire sauter le caisson le jour de son mariage hors scène. (on est propre rive gauche). Je résume évidemment parce que 3h20 (entracte compris quand même) faut remplir. Ce qui est surtout agaçant c’est le maniérisme de la mise en scène. Les changements à vue, le début de la pièce avec la salle allumée, (nous avions déjà eu droit dans un spectacle précédent…) sans vraiment de raison et l’annonce de début de spectacle faite en anglais qui font se gondoler, pardon pouffer, (discrètement, on n’est pas au théâtre du Temple) les spectateurs stylés. Le décor est glacial. je comprends que l’âme russe est du mal à s’y réchauffer.

ivanov_depagne-1Après l’entracte je demande à mes voisins ce qu’ils pensent de la pièce: Formidable. J’avoue du bout des lèvres que je suis un peu déçue… que n’ai-je dit là. Les voilà qui me sautent dessus :  » c’est comme cà , c’est lent Tchékhov.  » Ouh la, doucement bijou. Manifestement la liberté d’expression s’arrête aux marches de l’Odéon… je ne suis pas la seule à m’être copieusement embêtée, vu les quelques réflexions de spectateurs à la sortie, mais sûrement des béotiens comme moi. Jusqu’au 1er mars puis du 7 avril au 3 mai 2015.

 

 © Cosimo Mirco Magliocca

© Cosimo Mirco Magliocca

Côté Gorki, rive droite : je recommande chaudement. Le rideau se lève sur une forêt de bouleaux composés d’une multitude de têtes. Tous les personnages sont présents. Les estivants sont en villégiature au bord de la mer chez Bassov et sa femme Varvara où les semaines s’écoulent à discuter et à boire. Ce sont des gens à l’aise, des intellectuels aussi qui aiment à jouer des pièvces, écrire des vers… une classe qui s’est enrichie en faisant des affaires, en étant médecin ou homme de loi . En y regardant de plus près personne ne semble satisfait de sa vie. L’une trompe son mari avec l’associé de l’autre, le poète qui avait tant exalté Varvara par ses déclamations n’a plus d’inspiration et perd de sa fascination, le plus jeune ne trouve aucune aspiration (encore un qui s’ennuie, on comprend qu’ils picolent) dans leur univers. Une certaine résignation plane.

Les Estivants 2_1_0Maria, médecin secoue tout ce petit monde en posant des questions politiques et sociales. Une fracture se dessine peu à peu entre les « amis ». D’un côté ceux qui  se posent des questions sur le sens de leur vie et veulent tenter quelque chose, se rendre utile, construire et vivre dans un monde plus juste, vivre passionnément et puis ceux qui renoncent dépassés ou incrédules, ceux qui demeurent où ils sont, immobiles. Une distribution parfaite mais je donne une mention à Clotilde de Bayser que j’adore et à Loïc Corbery (oui je succombe à son charme). Une mise en scène de Gérard Desarthe où rien n’est froid où le temps habité, passe (c’est russe) et où les femmes prennent leur destinée en main.

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© Cosimo Mirco Magliocca

3h entracte compris et non, on ne s’ennuie pas même si certains people tel Pascal Bruckner sont partis à l’entracte. En même temps le lendemain y’avait école, faut les comprendre et encore ils ont pas vu Ivanov…